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Le dernier recueil de poésie de Francis Lepioufle : “C’est à dire”… ça fait du bien de l’entendre dire ! (1/5)

Publié le par Eric Bertrand

Séjour Bretagne (67) [1600x1200]

 

Qui se soucie de poésie en ce 21° siècle ? Ou du moins sait-on ce que c’est que poétiser ? Je ne parle pas de ces kitchs moments de poésie, printemps des poètes ou autres animations ponctuelles autour du Livre. Je me suis pour ma part toujours méfié de ces « journées de la femme », « fête des mères », « fête des pères, des grands-mères », « Saint Valentin », « journée de la courtoisie », « printemps des poètes »...  mais je m’applique au jour le jour à aimer les femmes, à être un bon fils, un citoyen courtois ou un esprit curieux de poésie...

L’un des intérêts du dernier ouvrage de Francis Lepioufle, c’est précisément d’offrir au lecteur l’occasion d’une réflexion sur la nature de la poésie et de cheminer en même temps, de texte en texte, au fil d’un recueil astucieusement nommé « C'est-à-dire » (Editions de la Roche de Muzon), dans cette « matière poétique »... sur fond de violence, immigration, assassinat, laïcité, altérité, faits divers, scènes de plage, de cuisine, de jardin, de pluie, de mer...

 

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Nolwenn Leroy : Ophélia et le « chant mystérieux qui tombe des astres »

Publié le par Eric Bertrand

 

 

Sur l'onde calme et noire où dorment les étoiles
La blanche Ophélia flotte comme un grand lys (...)

          Ainsi commence le beau poème qu’Arthur Rimbaud consacre à la malheureuse Ophélia, amante du mélancolique Hamlet.

 

« O pâle Ophélia, belle comme la neige!
Oui tu mourus, enfant, par un fleuve emportée!

 

Et dans sa tragédie, l’auteur de « Roméo et Juliette » auquel Rimbaud fait ici allusion, rapporte également les tourments amoureux de deux autres cœurs purs épris d’absolu : Hamlet et Ophélie.


« Un chant mystérieux tombe des astres d'or (...)

 

-- Et le poète dit qu'aux rayons des étoiles
Tu viens chercher, la nuit, les fleurs que tu cueillis,
Et qu'il a vu sur l'eau, couchée en ses longs voiles,
La blanche Ophélia flotter, comme un grand lys ».

 

          « Sur l’oreiller blanc des abysses », Ophélia inspire aujourd’hui Nolwenn Leroy... Une Ophélia légèrement différente de son modèle, une Ophélia plus marine et plus « sirène » que son modèle. Les vagues de l’océan ont fait ployer les saules, et l’eau cristalline se tord désormais sous le lichen amer... Dans un autre de ses poèmes, Rimbaud dit qu’il a descendu lui aussi ses « fleuves impassibles » avant de se « baigner dans le poème de la mer ».

 

« Je descends lentement,
Mon corps enfin se repose,
Les cheveux longs dans le courant
Ondulent en caressant (...)

 

Je n’entends ni ne respire,
Les vagues se retirent,
Sur l’oreiller blanc des abysses,
Je peux me laisser partir...

 

Ne me retiens pas,
Même si les bras froids du tendre océan te saisissent, englacent ton cœur,
Tu me rejoindras,
Ne me sauve pas,
Coule avec moi,

Ne me retiens pas »

 

          Au moment où le « bateau ivre » de Nolwenn disparaît sous le flot, une voix monte, une voix transparente et fraîche où « nage Ophélia »... Le visage lumineux de la sirène est à la proue, et c’est peut-être le visage de Nolwenn l’interprète de « ce chant mystérieux qui tombe des astres ».

 

D’un coquillage blanc,
On renaîtra émerveillé dans la lumière,
On ouvrira nos paupières closes,
Devant la beauté d’une autre mer.

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Julien Clerc Symphonique : « Là tout n’est qu’ordre, calme, luxe et volupté » (intégral)

Publié le par Eric Bertrand

 

 

 

La scène se passe à l’Opéra Garnier. C’est d’abord un piano noir, sobre. Le spectateur s’attend à retrouver cette voix si particulière, ces mélodies, ces mots qui ont toujours créé un univers et qui refont descendre le grand fleuve...C’était il y a combien d’années ? Dix ans ? Vingt ans ? Trente ? « Jivaro song » : 1968 !

             Mais dans le spectacle « Symphonique », il y a décidément quelque chose de nouveau, quelque chose qui prend soudain aux cheveux. Dans un décor propice à la grande tragédie, ou à la grande comédie, c’est le « Songe d’une nuit d’été » qui s’empare du spectateur et qui le fait basculer.

             Après les premières chansons, Julien Clerc quitte le piano et cite une analyse de Charlie Chaplin dans laquelle il parle des artistes... Les écrivains sont muets car ils gardent leurs effets pour les pages de leurs romans, les savants ne peuvent rien dire non plus car ils pétrifient ceux qui les entourent, les peintres jouent parfois les philosophes et par conséquent se trompent de sujet... et en définitive, ce sont les musiciens qui prennent le pouvoir sur le public. « Il n’y a rien de plus facile et de plus émouvant que le spectacle d’un orchestre... »

             Et quand ce spectacle passe la réorchestration des mélodies de Julien Clerc, il se produit en effet un effet de transport, ce transport dont parle Charles Baudelaire » à propos du vertige de la musique...

 

La musique souvent me prend comme une mer !
Vers ma pâle étoile,
Sous un plafond de brume ou dans un vaste éther,
Je mets à la voile;

La poitrine en avant et les poumons gonflés
Comme de la toile
J'escalade le dos des flots amoncelés
Que la nuit me voile (...)

 

             La caméra tourne doucement, promène le spectateur sur tous les coins de l’espace. Détails des instruments, cuivres, violoncelles, guitares, trombones, trompettes, castagnettes... Velours rouge des sièges, marbre des statues. Gros plans sur les visages... Fin maquillage, yeux charbonneux, rouge à lèvres sur un beau sourire. Beaucoup d’émotion, joue contre le violon, œil sur la partition, genou contre le violoncelle... Les yeux se ferment, la musique doucement monte aux dorures de l’Opéra Garnier. Visages jeunes des musiciens plongés en eux-mêmes, maitres absolus de leur art. Visages sympathiques, devenant familiers. Celui-ci ressemble un peu à ce copain de mon adolescence qui dodelinait de la tête en écoutant « Jivaro song ». Avec un air de jubilation, il m’avait fait écouter cette « drôle de chanson qui ne ressemblait à rien de connu »

             Fond de lumière bleutée qui semble remonter le fil du temps et profil voluptueux des musiciennes dont la grâce et l’élégance empruntent à leurs violons, à l’archet qui vibre. Jeunes femmes peut-être descendues tout droit des chansons de tout le répertoire, « filles de la véranda », « fée qui rend les femmes belles », « veuves de Joe Stan Murray », « Andalouses » tout en noir. « La Belle est arrivée »... C’est un peu le décor d’un film de Cocteau...

             Renfoncement somptueux des loges derrière les colonnes, comme les refuges des grandes orgues basaltiques de la pleine mer. Vénus sortant de l’écume, silhouettes botticelliennes, « Femmes, je vous aime ! » Visages éblouis, hallucinés, parfois un sourire, un mouvement souple et lent de la gorge, caméra qui tournoie, effets multiples des lumières, rouges, jaunes, vertes, bleues. Par moments, le piano noir revient seul, séparé des musiciens par une gaze d’un rouge léger qui irréalise les contours, offre, derrière cette paroi aux lueurs d’aquarium, un spectacle d’ombres chinoises

             Ciel étoilé, pailletage du sol, visage doré sous la lumière jaune de la violoncelliste dont les lourds cheveux bruns me rappellent le visage jeune à cette époque de ma grand-mère. J’avais dix ans et elle fredonnait « le Patineur ». J’étais fier d’avoir fait découvrir Julien Clerc à ma grand-mère... Clin d’œil dans le public des Patineurs qui ont déployé la bannière. J’en reconnais quelques-uns sans jamais les avoir rencontrés autrement que par le biais de « Pour y Voir Clerc ». Cravate rouge de Sertao en accord avec le velours des sièges.

             Revoilà la gaze qui descend et sépare à nouveau les musiciens. L’imaginaire de la musique dans un écrin... Créatures qui ne seraient, dans cette lumière d’abîme, que bulles sonores appelées à remonter à la surface et à déferler en rêve de musique. Feu d’artifice de la lumière qui pleut en cascade, lumière qui remonte sur le parterre comme du fond d’un sol sableux. Extraordinaire recueillement du public. Les anges passent, ils ont le visage des anges de Chagall qui reçoivent la musique au plafond et qui la renvoient en écho aux tableaux de la cité des Doges projetés sur le fond de la scène, Canaletto, Turner... « Elle voulait qu’on l’appelle Venise ».

             Métamorphose finale. Tous ces gracieux musiciens, ces élégants dandys dignement vêtus de chemises blanches, de fourreaux noirs, bien peignés, cheveux vaporeux, gestes mesurés, abandonnent les instruments, guitares et joints cachés dans l’herbe des réminiscences, se mettent à chanter « Let the Sun shine » !  Combien de chemins parcourus depuis « Hair », combien de lumières psychédéliques et combien de fleurs dans les cheveux !

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Julien Clerc Symphonique : « Là tout n’est qu’ordre, calme, luxe et volupté » (3/3)

Publié le par Eric Bertrand

 

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Ciel étoilé, pailletage du sol, visage doré sous la lumière jaune de la violoncelliste dont les lourds cheveux bruns me rappellent le visage jeune à cette époque de ma grand-mère. J’avais dix ans et elle fredonnait « le Patineur ». J’étais fier d’avoir fait découvrir Julien Clerc à ma grand-mère... Clin d’œil dans le public des Patineurs qui ont déployé la bannière. J’en reconnais quelques-uns sans jamais les avoir rencontrés autrement que par le biais de « Pour y Voir Clerc ». Cravate rouge de Sertao en accord avec le velours des sièges.

                Revoilà la gaze qui descend et sépare à nouveau les musiciens. L’imaginaire de la musique dans un écrin... Créatures qui ne seraient, dans cette lumière d’abîme, que bulles sonores appelées à remonter à la surface et à déferler en rêve de musique. Feu d’artifice de la lumière qui pleut en cascade, lumière qui remonte sur le parterre comme du fond d’un sol sableux. Extraordinaire recueillement du public. Les anges passent, ils ont le visage des anges de Chagall qui reçoivent la musique au plafond et qui la renvoient en écho aux tableaux de la cité des Doges projetés sur le fond de la scène, Canaletto, Turner... « Elle voulait qu’on l’appelle Venise ».

                Métamorphose finale. Tous ces gracieux musiciens, ces élégants dandys dignement vêtus de chemises blanches, de fourreaux noirs, bien peignés, cheveux vaporeux, gestes mesurés, abandonnent les instruments, guitares et joints cachés dans l’herbe des réminiscences, se mettent à chanter « Let the Sun shine » !  Combien de chemins parcourus depuis « Hair », combien de lumières psychédéliques et combien de fleurs dans les cheveux !

 

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Julien Clerc Symphonique : « Là tout n’est qu’ordre, calme, luxe et volupté » (2/3)

Publié le par Eric Bertrand

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La caméra tourne doucement, promène le spectateur sur tous les coins de l’espace. Détails des instruments, cuivres, violoncelles, guitares, trombones, trompettes, castagnettes... Velours rouge des sièges, marbre des statues. Gros plans sur les visages... Fin maquillage, yeux charbonneux, rouge à lèvres sur un beau sourire. Beaucoup d’émotion, joue contre le violon, œil sur la partition, genou contre le violoncelle... Les yeux se ferment, la musique doucement monte aux dorures de l’Opéra Garnier. Visages jeunes des musiciens plongés en eux-mêmes, maitres absolus de leur art. Visages sympathiques, devenant familiers. Celui-ci ressemble un peu à ce copain de mon adolescence qui dodelinait de la tête en écoutant « Jivaro song ». Avec un air de jubilation, il m’avait fait écouter cette « drôle de chanson qui ne ressemblait à rien de connu »

             Fond de lumière bleutée qui semble remonter le fil du temps et profil voluptueux des musiciennes dont la grâce et l’élégance empruntent à leurs violons, à l’archet qui vibre. Jeunes femmes peut-être descendues tout droit des chansons de tout le répertoire, « filles de la véranda », « fée qui rend les femmes belles », « veuves de Joe Stan Murray », « Andalouses » tout en noir. « La Belle est arrivée »... C’est un peu le décor d’un film de Cocteau...

             Renfoncement somptueux des loges derrière les colonnes, comme les refuges des grandes orgues basaltiques de la pleine mer. Vénus sortant de l’écume, silhouettes botticelliennes, « Femmes, je vous aime ! » Visages éblouis, hallucinés, parfois un sourire, un mouvement souple et lent de la gorge, caméra qui tournoie, effets multiples des lumières, rouges, jaunes, vertes, bleues. Par moments, le piano noir revient seul, séparé des musiciens par une gaze d’un rouge léger qui irréalise les contours, offre, derrière cette paroi aux lueurs d’aquarium, un spectacle d’ombres chinoises.

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