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livres

« Les Portes de l’Enfer » de Laurent Gaudé

Publié le par Eric Bertrand

               Au cours de ces vacances, j’ai eu l’occasion de lire le dernier roman de Laurent Gaudé, auteur dont j’apprécie vivement l’univers. J’avais été ébloui par la force épique de « la Mort du roi Tsongor » ou la puissance d’évocation du « Soleil des Scorta »… Je n’ai donc pas manqué le rendez-vous avec « les Portes de l’enfer »…

              Le thème m’a interpellé et je l’ai abordé avec une certaine hésitation, on le comprendra étant donné le drame familial qui nous a touchés au moment de la disparition de Guillaume…

              Dans les rues de Naples, Matteo perd son fils de six ans dans une fusillade qui met aux prises des membres de la mafia locale. Ignoble réalité des hommes qui rattrape le chemin d’insouciance de l’enfant… Le père et la mère sont évidemment ravagés. Jusqu’au moment où Matteo trouve le moyen d’accéder aux portes de l’enfer et de retrouver le fils disparu. Merveilleuse aventure qui ramène l’esprit au vieux mythe d’Orphée et aux songeries sur la possibilité d’une résurrection.

               Difficile de suivre cet itinéraire initiatique dans les couloirs de la mort. Le lecteur a parfois du mal à y croire. Trop d’artifice, de mythologie, de rêve ou de légende pour  s’accorder le visa en même temps que la lecture…

              Mais il est des heures où lire devient un acte de prière… Prier, c’est à dire épouser la douleur du couple, l’hébétude et le vertige du désespoir, la volonté désordonnée d’agir pour réparer l’irréparable, la déambulation aux frontières de la vie et du rêve dans cette zone intermédiaire où l’on acquiert le sentiment que ce qui se joue sous nos yeux n’a peut être pas le sens qu’on lui attribue dans la réalité, l’inquiétante impression de l’évanouissement.

              Après l’épisode de l’enfer, le miracle se produit, le fils absent revient parmi les vivants. Il revient et accomplit la vengeance. Accomplit la promesse qu’il a faite à son père. Retrouve la figure désincarnée de la mère… Ces pages sont d’une rare intensité. Elles disent, au delà de l’histoire et des personnages, la douleur de l’absence, la détresse et l’égarement de l’abandon, l’instinct de survie et la mémoire du corps. Elles réalisent admirablement pour le lecteur ce que Laurent Gaudé écrit en dernière page à propos de son roman : « J’ai écrit ce livre pour mes morts. Les hommes et les femmes dont la fréquentation a fait de moi ce que je suis (…) »

 

Inside Girnigoe

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Le Voyageur de la Toussaint (7/7) : l’adaptation au cinéma

Publié le par Eric Bertrand


             Quand on annonce qu’il existe une version filmique du roman, la première réaction des élèves c’est de vouloir regarder le film pour évidemment éviter la lecture des 380 pages du livre de Poche !

             Comme chacun sait, les adaptations des romans ne sont que des adaptations. En tant que telles, elles ont leurs règles. En revanche, il est intéressant, une fois la lecture accomplie, de comparer les deux approches pour évaluer les différences et les ressources qu’utilisent les deux formes d’art.

              C’est en 1942 que Louis Daquin tourne « le Voyageur de la Toussaint ». Evidemment, le film n’est pas en couleurs et la plupart des scènes sont tournées en studio. Grosse déception à prévoir de la part des élèves ! 

              Passée cette première réaction affective, on remarquera le resserrement du temps opéré dans le film, fiançailles et non mariage, pas d’enfant, pas de promenade à Royan ni de visite à Fontenay, des ajouts de scènes : Alice trompe Gilles avec Plantel, ce qui conduit à une accelération de la rupture avec son « fiancé ». Ajout ou suppression de personnages (le début, la mère d’Alice), le témoignage du capitaine Huard remplacé par les aveux de Plantel. Babin est plus sympathique, Plantel plus ignoble, Gilles plus sûr de lui.

              Quelques infidélités bien compréhensibles qui aident les élèves à envisager lucidement les contraintes liées à l’usage de la caméra.


 
Bye bye just now to La Rochelle, back to the north tomorrow...

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Le Voyageur de la Toussaint (6/7) : les lieux

Publié le par Eric Bertrand


              Pour souligner le travail qu’opère le romancier à partir des lieux réels, nous amenons les élèves dans un parcours d’orientation dans La Rochelle avec les consignes suivantes et pour chaque parcours, sur le principe de la course au trésor, une série de questions à résoudre pour avancer…

 

Consignes

 

            Garder le parcours complet, la feuille de contrôle. Donner la carte du parcours. Les élèves s’orientent avec cette carte et se rassemblent sur le lieu où il y a la croix puis un seul élève entre dans l’endroit précisé en haut de la carte : il y fait poinçonner sa carte (à côté de l’autre marque qui y figure déjà)

             Rôle du prof : suivre le groupe, assurer la sécurité mais pas d’aide dans la recherche. Contrôler si les deux marques sont identiques. Si non : erreur d’orientation, reprendre la carte et changer. Si oui, donner aux é lèves l’énigme à trouver. Les élèves cherchent la réponse et la montrent au prof qui leur donne alors la carte suivante.

 

Parcours 1

1.      Rue Gargouleau. 2. Quai Maubec. 3. Place de l’Hôtel de ville. 4. Rue du Palais. 5. Rue St jean Perrot

Parcours 2

1.      Av du gal de Gaulle. 2. Quai Maubec. 3. Place Verdun. 4. Rue de l’Escale. 5. La Grosse Horloge

Parcours 3

1.      Rue de l’Escale. 2. Place de Verdun. 3. Quai Valin. 4. Quai Duperré. 5. Rue de la Chaîne

Parcours 4

1.      Rue Aufredi. 2. Place de l’Hôtel de Ville. 3. Quai Maubec. 4. Quai Simenon. 5. Rue St Jean du Perrot

 

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Le Voyageur de la Toussaint (5/7) : les lieux

Publié le par Eric Bertrand


            Lire le Voyageur de la Toussaint, c’est aussi se promener dans La Rochelle. Dès la première page, le héros arrive par la mer au port, bassin des Chalutiers. Le lecteur l’accompagne ensuite dans le quartier de la Grosse Horloge, et dans les différents bars que fréquentent les habitués.

            On peut aisément suivre les déambulations du héros tout au long des rues de La Rochelle, dans le quartier du Centre Ville. En dehors de quelques toponymes qui ont changé (« place d’Armes » est devenu « Place Verdun ») ou qu’invente Simenon (« Quai des Ursulines » à la place de « Quai Maubec ») c’est un véritable « parcours d’orientation » auquel nous convie l’auteur.

             C’est d’ailleurs ce que nous avons proposé à l’un des ateliers d’élèves qui suivront le héros à partir d’une carte. En dehors du Centre Ville, les héros rayonnent aussi en direction de Nieul Sur mer et Esnandes, petits villages du proche La Rochelle…

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Le Voyageur de la Toussaint (4/7) : le contexte historique

Publié le par Eric Bertrand


             L’un des intérêts de ce livre, c’est de situer ses personnages et son intrigue dans un La Rochelle sombre, comme si l’espace était imprégné par le climat de l’Occupation. Le lecteur perspicace ne peut en effet pas faire l’économie de cette réalité de l’écriture. Simenon a écrit « le Voyageur de la Toussaint » en 1941 et cette « pression » de l’Histoire se perçoit dans l’univers fictif qu’il crée.

- A travers l’évocation des notables de La Rochelle, le roman met en scène des hommes politiques sans foi ni loi qui tiennent les ficelles des affaires. Pas de conflits sociaux, pas de crises, tout se fait en douceur par une « douce collaboration » entre les maîtres et les serviles…

- Il reproduit pour les mettre à distance les leitmotivs de l’esprit de Vichy : « Travail, Famille, Patrie » : qu’en est-il de l’image de la famille ? Elle est trouble : d’un côté, cette famille idéale à laquelle s’accroche Gilles, le héros, famille perdue et rêvée… De l’autre, cette famille réelle, cette autre mère corrompue qui assassine pour sauver son fils (la tante Eloi, sœur de la mère de Gilles)

              Gilles se marie mais son mariage est aussitôt voué à l’échec, l’Epouse est une petite écervelée qui se démarque de la femme rêvée et qui participe à sa façon à la « mascarade » des familles. A sa façon, Alice renvoie à toute cette jeunesse dépravée que le régime de Vichy veut mettre au pas. Bob, le fils de la tante Eloi en est le meilleur représentant.

Il ne faut pas voir en Gilles non plus le héros idéal, incarnant les idées de Travail et de régénération de la nation ! Il est plutôt du côté du rêve et de la marginalité !

 

 

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