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Du beatnick au prix Nobel, Dylan et le sable de la mémoire

Publié le par Eric Bertrand

How many roads must a man walk down, before you call him a man ? (…)

Il y a dans cette accroche de la chanson de Dylan, tout un horizon qui ramène loin en arrière (« sentiers picotés par les blés » de Rimbaud, « feuilles d’herbe » de Whitman, routes poussiéreuses de Kérouac tout autour de la grande Amérique…) Et en même temps, au-dessus de l’immense sac à dos brinquebalant dans la lumière du couchant, au-dessus de l’ombre de guitare accrochée à l’épaule et sur la pointe des angles d’harmonica vissé aux lèvres, flotte autour du nom de Dylan un parfum d’éternité.

How many times must a man look up before he can see the sky ?

Yes, 'n' how many times can a man turn his head, pretending he just doesn't see ? (…)

Eternel vague à l’âme que dépose la poudre légère des chansons, lancinant questionnement... The answer, my friend, is blowin' in the wind (…) Eternel recommencement du dessin sur le sable : le petit garçon qui se construit, l’homme qui n’en finit pas de se construire en son château… « You will be a man my son »… C’est le vieux cours d’anglais qui revient à la mémoire…

Yes, 'n' how many times must the cannon balls fly before they're forever banned ?...

Yes, 'n' how many years can some people exist, before they're allowed to be free ?...

Les vieilles idoles du prof d’anglais, Beatles, Doors, Pink Floyd et « If »… Tout le poème de Rudyard Kipling appris par cœur cette année-là…

 

“If you can keep your head when all about you   

Are losing theirs and blaming it on you,   

If you can trust yourself when all men doubt you,

But make allowance for their doubting too;   

If you can wait and not be tired by waiting,

Or being lied about, don’t deal in lies,

Or being hated, don’t give way to hating,

And yet don’t look too good, nor talk too wise (…)”

« If » continue de s’écrire, fredonné dans le fond de la conscience par un poète à la voix nasillarde, à la fois plaisante et ironique, quasi grinçante. Et en même temps que « blowin in the wind », je me souviens de « Dust in the wind »« Just a drop of water in an endless sea… »

Toute littérature ne s’écrit d’abord que sur du sable. Les disques de Dylan continuent de tourner, disques de soleil dans les yeux et les microsillons de la mémoire. Avec Dylan, d’autres poètes, romanciers, chanteurs troubadours marchent sur la dune. Brel, Brassens, Ferré, Gainsbourg. Quelques autres encore… Ils marchent avec le vent et le sable se soulève doucement. Poèmes, romans, chansons, notes de musique palimpsestes, pans entiers de la mémoire.  Pierre chaude au creux des dunes, just a rolling stone !

Dylan

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